Marcher n'est pas un sport

Marcher n'est pas un sport.

Le sport, c'est une question de techniques et de règles, de scores et de compétition, nécessitant tout un apprentissage : connaître les positions, incorporer les bons gestes. Et puis viennent, longtemps après, l'improvisation et le talent.

Le sport, ce sont des scores : quelle est ta place ? Quel est ton temps ? Quel résultat ? Toujours le même partage du vainqueur et du vaincu, comme la guerre - il y a une parenté entre la guerre et le sport dont la guerre tire son honneur et le sport son déhonneur : du respect de l'adversaire à la haine de l'ennemi.

Le sport c'est aussi évidemment le sens de l'endurance, le goût de l'effort, la discipline. Une éthique, un travail.

Mais c'est encore du matériel, des revues, des spectacles, un marché. Ce sont des performances. Le sport donne lieu à des cérémonies médiatiques immenses, où se pressent les consommateurs de marques et d'images. L'argent envahit pour vider les âmes, et la médecine pour construire des corps artificiels.

Marcher n'est pas un sport. Mettre un pied devant l'autre, c'est un jeu d'enfant. Pas de résultat, pas de chiffres quand on se rencontre : le marcheur dira quel chemin il a pris, sur quel sentier s'offre le plus beau paysage, la vue que l'on a depuis tel promontoire.

On a bien essayé pourtant de créer un nouveau marché d'accessoires : des chaussures révolutionnaires, des chaussettes incroyables, des sacs efficaces, des pantalons performants... On tente bien de faire entrer l'esprit du sport : on ne marche plus, on "fait un treck". On vend des bâtons effilés qui font ressembler à des skieurs improbables. Mais cela ne va pas très loin. Ça ne peut pas aller loin.

La marche, on n'a rien trouvé de mieux pour aller plus lentement. Pour marcher, il faut d'abord deux jambes. Le reste est vain. Aller plus vite ? Alors, ne marchez pas, faites autre chose : roulez, glissez, volez. Ne marchez pas. Et puis en marchant, il n'y a qu'une performance qui compte : l'intensité du ciel, l'éclat des paysages. Marchez n'est pas un sport.

Mais une fois debout, l'homme ne tient pas en place.

Frédéric Gros, "Marcher, une philosophie", Ed. Flammarion 2011

Je me suis souvent demandée (et je me demande encore) ce qui m'attirait dans ce projet, quel était mon objetif :

• la performance physique ? Assurément non, je ne suis pas une athlète et ne compte pas le devenir, même si j'apprécie les trop rares moments où je me sens bien dans mon corps.
• l'aventure ? Certes, partir vers l'inconnu sera déjà pour moi toute une aventure, mais je ne suis pas attirée par les extrêmes que certains affectionnent. Mon voyage sera méticuleusement préparé dans un souci de consommation raisonnable, mais je ne manquerais pas d'utiliser tout moyen à ma disposition si cela s'avère nécéssaire.
• l'orientation religieuse ? J'aimerais beaucoup profiter de ce périple pour découvrir les congrégations de l'intérieur et laisser un peu de place à la spiritualité
• Peut-être que le principal objectif est de me retrouver en tête à tête avec moi-même, et que pour cela la simplicité sera mon premier atout.

A suivre, et à vivre...

Comments

[joelle]

Et la suite arrive, sept ans plus tard.

Eloge de la lenteur, c'est magnifique!